En collaboration avec OMalytics, on a décidé de vous faire un tour d’horizon des différentes présentations de l’édition 2017 de l’OPTA Pro Forum, un ensemble de conférences réalisées par des analystes statistiques à l’aide de données fournies par OPTA.
Comment décider quand tirer ?
Le Docteur Will Gürpinar-Morgan (@WillTGM) a présenté en février dernier une étude sur les stratégies d’équipe en Premier League, leur proportion, leur efficacité mais aussi leur évolution au fil des saisons.
Par “stratégie d’équipe”, l’auteur entend la façon dont sont menées les phases de possession. Il n’étudie pas de ce fait les phases arrêtées ni les options défensives retenues, sinon indirectement via la zone de transition comme on le verra plus tard.
Méthode
Pour identifier ces stratégies, il a utilisé les données des saisons 12/13 à 16/17 en Premier League en se concentrant sur les séquences qui se terminent par un tir. Cela représente un total de 19 000 tirs soit 44% du total sur la période.
Une fois ces données extraites, Will a modélisé les mouvements du ballon (passes ou dribbles) ainsi que sa vitesse de progression. A partir de ces éléments, et en appliquant un algorithme de classification appelé “partitionnement en k-moyennes” il a pu faire ressortir 13 types d’attaque, qu’il a regroupé en 6 grandes catégories.
Types d’attaque
Ces 6 grandes catégories sont les suivantes:
- Attaque rapide depuis son propre camp – faible nombre de passes, jeu direct et rapide.
- Attaque patiente depuis son propre camp – nombre important de passes et rythme lent.
- Récupération au milieu et attaque patiente – beaucoup de passes, rythme lent.
- Récupération au milieu et attaque rapide – passes dans l’axe, directes, rythme rapide
- Construction par les côtés – rythme modéré, beaucoup de centres
- Récupération haute – passes directes et centrales
Chacune de ses stratégies fait ensuite l’objet d’une analyse d’efficacité. Sans grande surprise, les récupérations hautes ou médianes associées à une attaque rapide ont le taux de conversion des tirs en but le plus élevé.
Cela s’explique en partie par la désorganisation de l’équipe adverse lorsqu’elle perd le ballon dans des zones inattendues. L’équipe qui attaque a ainsi davantage de latitude pour se rapprocher des cages, ce que démontre aussi l’auteur via l’étude de la distance des tirs.
Tendances en Premier League
On le sait, le style de jeu fait lui aussi l’objet de modes et de tendances en Europe. L’auteur révèle que la Premier League n’échappe pas à la règle. Parmi les styles qui prennent de l’importance récemment on dénombre la récupération haute et la récupération médiane avec attaque rapide.
L’influence d’entraîneurs comme Jürgen Klopp ou Claudio Ranieri, respectivement, n’y est sûrement pas étrangère. A l’inverse la construction sur les côtés qui se termine par un centre n’est plus tellement prisée outre-Manche.
Le cas de Leicester City
Lorsqu’on parle identité de jeu, Leicester City représente un parfait cas d’école. Là encore l’auteur montre comment cette identité se retrouve dans les chiffres et l’emphase mise, par rapport à ses adversaires, sur une récupération médiane suivie d’une attaque rapide. Cette différence est surtout marquée lors de l’épopée victorieuse de 2015/2016, ou presque 30% des tirs provenaient de ce type de construction.
Lors de la saison suivante, qui a vu le limogeage de Claudio Ranieri, la proportion d’attaques rapides a clairement diminué, pour finalement rentrer dans la norme. Une importante diminution qui souligne l’incapacité de l’équipe à se projeter rapidement vers l’avant.
Point de vue défensif
L’auteur continue son analyse en étudiant à l’inverse, la quantité et la proportion de récupérations médianes suivies d’attaques rapides subies par différentes équipes. Ici, les deux Manchester, Tottenham et Liverpool, ces équipes ayant changé d’entraîneur sur la période étudiée.
L’arrivée de Pochettino, on le voit, n’a pas été couronnée d’un succès immédiat. Son style de jeu assez agressif et haut sur le terrain a d’abord entraîné une augmentation significative de contre-attaques avant de réussir à mettre en place un système défensif plus sécurisant.
Louis Van Gaal a eu un impact diffèrent car quand bien même il a concédé en volume moins d’occasions sur contre-attaques, ce type de construction a augmenté en proportion. Probablement les conséquences d’un style de jeu relativement prudent, où les opportunités adverses sont majoritairement concédées sur une récupération au milieu et une attaque rapide.
Pour Jürgen Klopp, la tendance est similaire quoique moins marquée, mais les raisons en sont peut-être différentes. Les conséquences défensives de l’ancien coach de Dortmund étant de concéder moins d’occasions mais plus dangereuses. Ce qu’on note par l’augmentation de la proportion de contre-attaques.
L’échantillon est un peu faible pour Guardiola mais on relève tout de même les difficultés défensives qu’il a pu avoir à son arrivée.
Les joueurs
Certains joueurs sont plus adaptés que d’autres à certains types de construction. On voit, à titre d’illustration, qu’Alexis Sanchez est particulièrement impliqué sur les attaques rapides qu’elles soient lancées de loin, du milieu ou plus haut sur le terrain.
Questions qui restent ouvertes
Cette analyse ouvre un champ de possibles assez remarquable et, parmi les questions qui émergent, on trouve :
- Quelle construction marche le mieux contre telle autre ?
- Faut-il avoir un profil de construction équilibré ou varier ses attaques ?
- Les joueurs peuvent-ils s’adapter à tout type d’attaque ?
- Quelles sont les variations entre les championnats ?
Notre avis
@OMalytics : J’ai trouvé instructif la mise en relation du type d’attaque et de l’efficacité en termes de conversion. Même si je me demande dans quelle mesure le taux de conversion ne dépend pas davantage de la qualité de l’équipe que du type d’attaque pratiqué.
Même si je comprends le tropisme anglais de ce type de forum, je regrette évidemment l’attention mise sur la Premier League, d’autres championnats présentant certainement des caractéristiques différentes.
@Birdace : Ce n’est pas la première fois que l’importance des attaques rapides ou des récupérations hautes est mise en avant mais cette conférence va un peu plus loin. En découpant plus précisément les types d’attaque, notamment. Ou en abordant l’aspect défensif et les joueurs.
Comme souvent, l’ouverture sur de futures recherches est la partie la plus excitante. Maintenant que cette classification est établie, quelle peut être son impact sur le recrutement ou la préparation de match ? J’ai l’impression que mieux définir le style d’une équipe est un des thèmes de ce forum.
La vidéo de la conférence de Will Gürpinar-Morgan
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