Previews Ligue 1 : Bordeaux

Girondins de Bordeaux

Au tour de Bordeaux de se soumettre au jeu des articles previews sur la saison 2020/2021 de Ligue 1.

Les Girondins de Bordeaux ont connu une saison 2018-2019 catastrophique. Ils ont fini 14ème avec 41 points, leur plus mauvais classement en 15 ans. Le chaos autour de la vente du club a déteint sur le sportif, et l’équipe a connu 4 entraîneurs différents.

Le dernier nommé, Paulo Sousa, a dirigé les 11 derniers matchs. Malgré des résultats décevants (2 victoires, 3 nuls et 6 défaites), il a suscité certains espoirs car il a essayé de mettre en place un plan de jeu ambitieux. La nouvelle direction lui a apporté son soutien à 100 % et se disait même prête à faire les investissements nécessaires pour que Sousa ait les bonnes pièces à disposition dans son système.

Classement des Girondins de Bordeaux en D1/L1 depuis 1994-1995

Lors de la saison 2019-2020, après une entame difficile, les Girondins de Bordeaux se sont retrouvés à la lutte pour les places européennes. Ils étaient même 3èmes à la fin de la 16ème journée avec la 2ème meilleure attaque. Malgré cela, à la clôture du championnat, ils ont fini à une décevante 12ème place. Que s’est-il passé ?

 

Une attaque en réussite

 

La conservation du ballon dans le système hybride : une réussite

Les médias ont souvent critiqué le dispositif mis en place par le technicien portugais car il serait très compliqué à assimiler pour les joueurs, à cause de son caractère hybride. Pour le résumer rapidement, il s’agit d’un 4-4-2 en phase défensive mais d’un 3-4-2-1 en phase offensive.

Un des défenseurs a un rôle de central ou de latéral selon la phase et, de la même façon, un des milieux offensifs vient se loger sur un côté du milieu à 4 en phase défensive. Ce n’est finalement pas si différent de tous les 4-2-3-1 se transformant en 4-4-2 pour effectuer le pressing.

Cependant, il faut noter qu’à partir de la journée 21 (Nantes-Bordeaux), Sousa a renoncé à son système et il est repassé à un 4-2-3-1 « classique ».

Formations utilisées par Bordeaux en Ligue 1 2019/2020

Concernant les intentions de jeu, l’ancien joueur de la Juventus insiste sur la nécessité de ressortir de l’arrière par une succession de passes courtes pour trouver un décalage.

Bordeaux est ainsi la 4ème équipe de L1 avec le plus grand nombre de passes réussies et ils affichent le 4ème taux de réussite de passes de L1 (82,5%). Une des conséquences de cette volonté de ressortir « proprement » est que les Girondins sont la 5ème équipe avec le plus de possession du ballon (53,9%).

Lors de ces phases de construction, les joueurs ont le plus souvent réussi à contenir le pressing adverse même si Pablo et, surtout, Mexer ont donné parfois des sueurs froides aux supporters. L’équipe a toujours semblé pouvoir amener le ballon au cœur du jeu, elle est ainsi la 2ème équipe de L1 avec le plus de touches de balles dans le tiers médian du terrain.

L1 Saison 2019/2020 : Passes assurées, possession conservée

 

Une création par la passe laborieuse

En revanche, l’équipe a régulièrement peiné à rentrer dans le dernier tiers adverse. L’équipe est tout simplement la dernière en L1 au nombre de ballons joués dans le tiers offensif et la 18ème au nombre de ballons joués dans la surface adverse.

D’une façon globale, le jeu de passes bordelais a manqué de verticalité. En effet, l’équipe est avant-dernière en L1 au nombre de passes réussies vers l’avant (définies comme une passe faisant gagner au moins 9 mètres).

Ratio Passes Tiers Offensif / Tiers Défensif

Le symbole de ce problème est Otávio. Il est le joueur de champ bordelais avec le plus gros temps de jeu. Il est aussi celui qui a tenté et réussi le plus de passes. Il est d’ailleurs le 6ème joueur de L1 au nombre de passes réussies et le 3ème milieu derrière Verratti et Gueye. Il réussit plus de 90% de ses passes et 82% de ses passes longues mais ces statistiques flatteuses révèlent aussi une absence totale de prise de risque dans ses choix.

Ainsi, en moyenne sur les 61 passes par 90 minutes qu’il tente, moins de 3 se concrétisent par des passes réussies vers l’avant.

Otavio : un gros volume mais peu de progression vers l'avant

Dans le double pivot de Bordeaux, il doit donc clairement être associé à un joueur plus créatif. Malheureusement, aucun n’a donné réellement satisfaction dans ce rôle (Basic, Tchouameni, Adli, Aït-Benasser).

Nous pouvons toutefois noter que les décrochages de De Préville ont souvent apporté une solution à ce problème. Il a eu un rôle majeur dans la construction du jeu. Il est ainsi le 9ème milieu offensif ou attaquant avec le plus de passes vers l’avant.

La création sur les ailes est un autre souci des Girondins. Le dispositif met les pistons dans des situations favorables en leur laissant beaucoup d’espace pour créer du danger car les défenseurs adverses sont fixés (en théorie) par les 3 joueurs girondins à vocation offensive. Cependant, aucun joueur n’aura su être une menace sérieuse à ce poste, seul Sabaly dépasse les 0,10 xA/90min (avec 0,13 xA/90min) quand il a eu ce rôle.

 

De la réussite devant, mais pas que

Ce peu de ballons joués dans le dernier tiers et dans la surface adverse a eu pour conséquence un faible nombre de tirs tentés (17ème de L1 avec environ 11 par match). Et cela ne traduit pas réellement une volonté de ne tirer que dans de bonnes situations, la qualité des occasions se situant dans la moyenne de la L1 (0,10 NPxG/tir, 8ème ratio en L1).

Pourtant, les Girondins affichent la 6ème attaque avec 40 buts marqués (dont 2 pénaltys) en 28 matchs. Ils ont largement surperformé le nombre de buts attendus par le modèle des xG. Leur NPxG est de 29,5, il y a donc eu une surperformance de 8,5 buts. C’est de très loin la plus grande surperformance en L1 (Amiens est 2ème avec +4,9).

Il est en général difficile de se prononcer sur cet écart à la moyenne mais tout laisse penser que, dans ce cas, il s’agit surtout de beaucoup de réussite. Il est difficile de penser que la qualité des joueurs garantit la reproductibilité de ce résultat.

La réussite des Girondins face au but

Pour compenser ce manque de création dans le jeu, Bordeaux a su optimiser une source de buts plus mécanique : les coups de pied arrêtés. Sur cette phase de jeu, ils sont tous simplement les meilleurs en L1 avec 12 buts marqués.

Avec 30% de leurs buts dans ce type de situation, les Girondins sont de loin l’équipe la plus dépendante de ces phases de jeu. Ils profitent d’avoir dans leur effectif deux excellents tireurs de CPA avec Basic et De Préville (et seulement 157 minutes de Benrahou, snif !) mais aussi de quelques bons joueurs de tête (Pablo et Hwang, principalement).

Du point de vue de la mise en place, Sousa semble demander à un homme de marquer le gardien et aux autres de se grouper aux abords des 6 mètres, plutôt au premier poteau.

 

Un pressing réfléchi, une défense moyenne

 

La réussite du pressing

A la perte du ballon, comme dit précédemment, le dispositif devient un 4-4-2 et les deux attaquants ont pour vocation d’empêcher les relances courtes des défenseurs centraux.

Cela a porté ses fruits, les Girondins ont fini 3ème au classement du PPDA (le nombre de passes autorisées par action défensive dans le camp adverse). Mais, surtout, ils ont réussi à faire cela sans prendre énormément de risques. Ils sont la 7ème équipe déclenchant le plus de pressing mais ils ne sont que la 10ème équipe de L1 dans le tiers adverse.

En effet, l’approche de Sousa est très pragmatique : si la récupération ne se fait pas très rapidement alors l’équipe se replie. Ce pressing réussi est bien sûr un des facteurs qui permet à Bordeaux d’avoir une possession aussi élevée.

Un pressing efficace

Point notable : parmi les buteurs de L1 ayant joué au moins l’équivalent de 10 matchs pleins, Jimmy Briand est celui qui effectue le plus de pressing par minute passée à défendre. Tout en maintenant un taux de récupération après pressing (27,9%) dans la moyenne haute.

Quand son concurrent pour le poste de numéro 9, Maja (oui, la star de la série Netflix), joue, il est tout aussi actif. En revanche, son taux de réussite est bien inférieur (21,6%) à celui de son aîné. Sousa a expliqué que Maja joue peu car il ne comprend pas ce qu’attend son entraîneur de lui au pressing, ce taux de réussite faible met bien cela en lumière.

Briand : un travail défensif énorme et efficace

 

Otávio omniprésent à la récupération

Cette première ligne passée, un homme s’est mis en évidence défensivement : c’est une nouvelle fois Otávio. Il a un volume de tacles gagnés, d’interceptions et de pressings déclenchés très impressionnant. Si nous rapportons ses statistiques au temps de possession défensive et que nous le comparons aux autres milieux de L1 avec au moins 900 minutes de jouées, il est respectivement 7ème, 9ème et 5ème dans ces différentes catégories.

Otavio : un énorme volume de récupération

Une nouvelle fois, il existe un petit bémol à cela : il a souvent été passé par ses adversaires. Il affiche un taux de réussite de seulement 34,1% face aux tentatives de dribbles adverses. Si nous ajoutons à cela son volume de fautes, qui est assez élevé, et un taux de duels aériens remportés moyen (48,1%), nous sommes face à un joueur très actif mais qui n’est pas d’une fiabilité absolue dans l’entre-jeu. Le joueur est sans doute utilisé au maximum de ses capacités défensives.

...mais moyennement fiable au duel

 

Une défense parfaitement moyenne

Enfin, le juge de paix des défenses est les buts encaissés. La défense bordelaise a encaissé 35 buts (dont 2 pénaltys et 1 CSC), ce qui en fait la 10ème défense de L1. Si nous nous attardons sur les xG, ils en ont subi 34,8 ce qui en fait aussi la … 10ème défense de L1. Et concernant la qualité moyenne des tirs subis ? C’est également la 10ème de L1 (0.28 PSxG/tir).

A tout cela, nous pouvons ajouter que Costil a eu des performances en ligne avec le modèle des PSxG (il a « encaissé » 0,7 but de plus que prévu). Il s’agit donc, littéralement, de ce qui se fait de plus moyen en L1.

Nous pouvons toutefois relever qu’une nouvelle fois, sur coups de pied arrêtés, la défense girondine a bien performé. Elle n’a encaissé que 5 buts sur ces phases-là (6ème en L1). Elle profite forcément d’avoir des défenseurs avec des taux de duels aériens gagnés parmi les plus élevés du championnat.

En particulier, Pablo peut prétendre au titre de meilleur joueur de tête de L1 (voire d’Europe ?). Il gagne 77,4% de ses duels aériens (5ème parmi les joueurs avec plus de 900 minutes joués en L1), et il est 2ème en nombre de duels remportés. Dans les airs, c’est à la fois un roc défensif et une menace offensive (4 buts dont 2 de la tête).

Pablo : monstre dans les airs

 

Conclusion

Durant la saison 2019-2020, les Girondins de Bordeaux n’ont jamais su complétement maîtriser leur sujet. Ils ont été médiocres défensivement et ils n’ont pas su faire de différences offensivement, principalement par manque d’inspiration. La 12ème place a pu sembler surprenante car les Girondins ont longtemps été à la lutte pour les places européennes mais, en réalité, le résultat final est en ligne avec leurs performances.

xG pour et contre depuis l'arrivée de Sousa

Si le club ne traversait pas actuellement une crise de gouvernance et financière, il serait probablement envisageable de redresser la situation. La venue d’un piston, ou deux, pourrait enfin permettre d’apporter du danger sur les côtés.

L’arrivée d’un milieu créateur, capable de jouer dans un double pivot, pourrait être un plus. Mais nous pouvons aussi espérer que la progression de Basic, ou la remise en forme de Pardo, permette de combler ce besoin.

Enfin, dans les 3 postes de devant, la venue d’un ou deux joueurs capables de faire des différences individuelles serait un vrai plus.

Mais, avant de pouvoir proposer des pistes envisageables, nous devons savoir à quel point le club a besoin de vendre des joueurs.

Article écrit par Ismaël Haffoud (@I11vs11)
https://www.youtube.com/11contre11

Le reste des previews est accessible ici : Previews Ligue 1 : Sommaire

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